07 octobre 2025

Espoir fragile au Moyen-Orient


« Pour le deuxième anniversaire du massacre du 7 octobre 2023, un espoir fragile de paix renaît au Moyen-Orient. Le Hamas et l’État d’Israël ont repris les discussions, en Égypte, à partir d’un plan de paix en 20 points imaginé par un improbable pacificateur, Donald Trump lui-même. Si la tendance se maintient, le président des États-Unis pourrait accomplir une percée diplomatique inédite depuis les accords d’Oslo, en 1993.


« Il y a beaucoup de si dans l’équation. Depuis le début du conflit impitoyable entre le Hamas et Israël, plus d’un espoir de cessez-le-feu a été trahi. Le cœur du litige n’a pas changé par magie. Le Hamas, groupe terroriste responsable d’un véritable pogrom, nie le droit d’existence à l’État d’Israël. Le pays démocratique, dévoré par son extrême droite religieuse, ne reconnaît pas plus le droit à un État palestinien, ni sur les frontières de 1967 ni sur aucune frontière. L’assaut terrible mené sur la ville de Gaza de même que la poursuite intensive de la colonisation dans les territoires occupés en sont des preuves éloquentes. Pour dissiper tout doute sur la question, le premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou, a clairement indiqué, lors de son récent discours à l’ONU, qu’il n’y aurait jamais d’État palestinien, alors que le Canada, la France, le Royaume-Uni et l’Australie s’engageaient sur la voie de la reconnaissance.


« Les deux camps sont pourtant de retour à la case négociation, prêts à discuter du plan de paix proposé par le président Trump. L’accord projeté prévoit un cessez-le-feu, la libération des 48 otages morts ou vivants encore détenus par le Hamas, la libération de prisonniers palestiniens et le retour de l’aide humanitaire pour soulager l’enclave affamée de Gaza, où plus de 67 000 Palestiniens ont été tués, selon les données du ministère de la Santé de Gaza. L’entente comprend aussi le retrait graduel de l’armée israélienne de la bande de Gaza, et son remplacement par une force internationale de stabilisation. Le Hamas est censé renoncer aux armes et à la gouvernance du territoire anéanti en échange de l’amnistie. Un comité de reconstruction, présidé par Donald Trump, serait mis en place jusqu’à ce que l’Autorité palestinienne exsangue puisse se réformer et prendre le relais. À terme, les discussions sur le droit à l’autodétermination des Palestiniens et la reconnaissance de leur État pourraient reprendre, un de ces jours.


« La fragilité de l’édifice est évidente. Les frappes se poursuivent toujours sur Gaza, malgré les appels du président Trump à un arrêt « immédiat » des hostilités. Et Benjamin Nétanyahou souffle le chaud et le froid en affirmant qu’il soutient le plan Trump, tout en ignorant l’un de ses principaux éléments, soit le retrait de l’armée israélienne de Gaza. Qui plus est, le Hamas est tout sauf un interlocuteur valable. Il pourrait très bien rendre les armes et rebâtir ses capacités sans jamais renoncer au terrorisme.


« Les espoirs de « paix éternelle » évoqués par la Maison-Blanche sont grossièrement exagérés. Dans le meilleur des scénarios, nous assisterons à un échange de prisonniers et à un cessez-le-feu qui permettront de franchir les prochaines étapes vers la reconstruction de la bande de Gaza. Elle sera laborieuse, empreinte de méfiance et marquée par le caractère irréparable des traumatismes éprouvés par les deux peuples.


Les Israéliens ne se remettront sans doute jamais de l’atteinte à leur sécurité intérieure. Tué, violés, torturés, pris en otages : ils se sont réveillés le 8 octobre avec la constatation que leur puissante armée n’avait pas pu les protéger d’une barbarie d’un autre siècle. Et une partie du monde célébrait le carnage dans les rues, même à Montréal, nous rappelant de manière sinistre que l’antisémitisme est un fauve au sommeil léger. Les Palestiniens ne comprendront pas plus pourquoi, depuis deux ans, ils ont été bombardés, ensevelis sous les ruines, déplacés, affamés et tués par dizaines de milliers au nom de l’éradication du Hamas, au point que les allégations persistantes de génocide suivront l’État hébreu sur la durée.


« Aucun leader, pas même le grandiloquent Donald Trump, ne pourra prétendre à la réconciliation des peuples. Cette mission presque impossible appartiendra à la société civile, en Israël et en Palestine, sur le long temps de l’histoire. Encore faudra-t-il que le sécularisme retrouve son droit de cité dans la donne politique du Moyen-Orient et que les deux peuples acceptent le principe de leur inéluctable cohabitation, quelque part entre sécurité et territoire pour chacun. »


Éditorial intitulé

Fragile espoir de paix

Brian Myles

Le Devoir

le 7 octobre 2025

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