« Après plus de deux ans de violents combats, un fragile accord de cessez-le-feu est entré en vigueur le 10 octobre entre le Hamas et Israël. Deux mois plus tard, la première phase de l’entente n’est toujours pas achevée : le corps d’un otage israélien n’a pas été restitué et des restrictions à l’acheminement de l’aide humanitaire perdurent. Et, surtout, la deuxième phase de l’accord tarde à être mise en place. Le Devoir fait le point.
Est-ce que le cessez-le-feu tient encore ?
« Des frappes israéliennes ont toujours lieu à Gaza, mais elles sont moins virulentes qu’avant le 10 octobre. Tant le Hamas qu’Israël accusent l’autre de multiples violations du cessez-le-feu.
« Selon le ministère de la Santé de Gaza, contrôlé par le Hamas, au moins 401 Palestiniens (civils et combattants) ont été tués par des tirs israéliens depuis le 10 octobre. De son côté, l’armée israélienne déplore la mort de trois de ses soldats à Gaza durant cette période.
« Vendredi, une frappe israélienne sur l’École des martyrs de Gaza, utilisée comme abri, a fait six morts, dont un bébé de 4 mois et une adolescente de 14 ans, a affirmé le directeur de l’hôpital al-Shifa, Mohammed Abou Salmiya.
« L’armée israélienne a déclaré avoir ouvert une enquête sur l’événement et « regretter tout préjudice causé à des [civils] non impliqués », selon le Times of Israel.
Où en sont les négociations sur la seconde phase de l’accord ?
« La Maison-Blanche espérait que la seconde phase du plan de paix de Donald Trump pourrait entrer en vigueur avant Noël, mais bien des aspects restent à être négociés.
« Cette phase — très complexe — prévoit le désarmement du Hamas, le retrait progressif de l’armée israélienne de toute la bande de Gaza, la mise en place d’une autorité de transition et le déploiement d’une force internationale. Des négociations ont eu lieu vendredi en Floride entre les États-Unis, l’Égypte, le Qatar et la Turquie — les médiateurs du cessez-le-feu.
« Après la rencontre, l’envoyé spécial des États-Unis pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, a réaffirmé sur le réseau social X « notre engagement total à l’égard de l’ensemble du plan de paix en 20 points du président » et a appelé « toutes les parties à respecter leurs obligations, à faire preuve de retenue et à coopérer avec les dispositifs de surveillance ».
Est-ce que les combats pourraient reprendre ?
« Si les négociations achoppent sur la seconde phase, il n’est pas exclu que les combats reprennent. La semaine dernière, Khaled Mechaal, un haut dirigeant du Hamas, a déclaré que le groupe islamiste ne rendrait pas les armes, mais pourrait geler son arsenal.
« L’idée d’un désarmement total est inacceptable pour la résistance », a-t-il dit au réseau Al-Jazeera. « Ce qui est proposé, c’est un gel ou un stockage [des armes]… afin de fournir des garanties contre toute escalade militaire à partir de Gaza face à l’occupation israélienne. »
« Le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Sa’ar, a rétorqué que, si le Hamas n’acceptait pas de se désarmer, « Israël devra gérer le problème ». Aux États-Unis, l’influent sénateur républicain Lindsey Graham a réclamé dimanche un délai clair pour le désarmement du Hamas, sans quoi il « encouragerait le président Trump à laisser Israël achever le Hamas ».
Est-ce que la famine perdure à Gaza ?
« L’ONU a indiqué vendredi que l’état de famine décrété à Gaza en août « n’est officiellement plus de mise dans le territoire palestinien ». « Un bien plus grand nombre de personnes peuvent désormais accéder à la nourriture dont elles ont besoin pour survivre », a souligné son secrétaire général, António Guterres. Les besoins sont toutefois immenses. Les trois quarts des habitants de Gaza ont des niveaux d’insécurité alimentaire jugés « critiques », « urgents » ou « catastrophiques », indique l’ONU.
« La majorité de la population vit dans des abris temporaires exposés aux intempéries. Dans les derniers jours, des tempêtes hivernales mêlant vent et froid ont causé d’importantes inondations à Gaza et ont entraîné la mort de trois enfants par hypothermie.
«Même si l’aide humanitaire entre plus facilement, de nombreuses restrictions perdurent. « Plus de 172 000 tonnes métriques d’aide préautorisée restent bloquées en attente de transfert vers l’enclave », a précisé l’ONU.
Quels sont les plans pour la reconstruction ?
« Vendredi, le Wall Street Journal a dévoilé les grandes lignes du projet Sunrise. Présenté par Jared Kushner, le gendre de Trump, et Steve Witkoff, ce plan propose que Gaza soit transformée en ville du futur jonchée de complexes hôteliers de luxe, de trains à grande vitesse et de réseaux électriques intelligents optimisés par l’intelligence artificielle.
« Cette proposition ressemble grandement au plan suggéré l’hiver dernier par Trump, qui consisterait à faire de Gaza une « Riviera » du Proche-Orient. Le gouvernement états-unien aurait présenté le projet Sunrise à plusieurs pays arabes.
« Sa réalisation est évaluée à plus de 112 milliards de dollars américains sur 10 ans, ce qui comprend des fonds pour l’aide humanitaire et les salaires des fonctionnaires. Il n’est pas précisé ce qu’il adviendrait des 2 millions d’habitants de Gaza pendant la reconstruction.
Pourquoi Israël a-t-il autorisé l’implantation de nouvelles colonies en Cisjordanie ?
« Le Conseil des ministres israélien a approuvé dimanche la création de 19 colonies en Cisjordanie, un autre territoire palestinien. La colonisation de la Cisjordanie, sous occupation israélienne depuis 1967, s’est intensifiée depuis l’attentat du Hamas du 7 octobre 2023.
« Selon l’organisation israélienne Peace Now, qui s’oppose à la colonisation, les colonies sont passées de 141 en 2022 à 210 aujourd’hui. Leur implantation, jugée illégale par le droit international, a pour effet de morceler le territoire palestinien.
« Dans un communiqué diffusé dimanche par le cabinet du ministre israélien des Finances, l’élu d’extrême droite Bezalel Smotrich, il est mentionné que cette initiative vise à empêcher la création d’un État palestinien. « Sur le terrain, nous bloquons l’établissement d’un État palestinien terroriste. Nous continuerons à développer et construire et à nous implanter sur la terre de notre patrimoine ancestral », est-il écrit.»
Chronique intitulée
Où en est l’accord de cessez-le-feu à Gaza ?
Magdaline Boutros
Le Devoir
le 23 décembre 2025

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